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La calibration en 2020 : le masque sur la bouche, pas sur les oreilles

Il y a quelques années, j’ai fait la rencontre de Rudi (Rudi, si tu m’regardes, salut à toi), qui à l’époque était étudiant à la SAE (une école d’audiovisuel francilienne). On a partagé quelques aventures musicales plutôt épiques (tmtc), et des bières. Avant de repartir dans son sud-ouest (presque) natal, Rudi m’avait dit « il faudra calibrer tes enceintes, c’est important, c’est même le premier truc qu’il faudrait faire« . Ça m’avait l’air laborieux, complexe, long, cher, boarf, j’avais pas envie. Et finalement…

Très peu de personnes se sont assises sur ce fauteuil en 2020

2020 a été une année au cours de laquelle j’ai produit peu de musique, mais j’ai énormément travaillé. C’est pendant les périodes creuses qu’on fait les grands travaux, qu’on prend le temps de faire ce qu’on ne se pense pas capable de faire dans le feu de l’action. En 2020, beaucoup de feux de l’action ont été éteints, notamment dans notre secteur d’activité. Bon, je n’ai pas « rien fait » non plus. Vous verrez les trucs qui sortiront en fin d’année et en début d’année 2021. Mais il n’y a eu tout simplement aucun enregistrement, aucune session d’écoute, depuis janvier dernier. On est en décembre. Cependant, 2020 n’aura pas été une année blanche (oui, j’écris « cependant », je me crois en cours de Français en 1997).

Extrait du live du 11 avril 2020 avec Devenir Ingeson, avec qui il a réalisé quelques travaux pratiques autour de sa méthode de quantifications sonores

Pendant le premier confinement, j’ai écouté toutes les vidéos de Patrick Thévenot que j’ai pu trouver sur internet. Patrick est un formateur et acousticien spécialisé en psycho-acoustique qui s’intéresse, et intéresse les gens, au concept de calibration d’enceintes, parce qu’enregistrer et prendre des décisions de mixage doit se faire en connaissance de cause, tout comme un photographe doit porter ses lunettes s’il a des problèmes de vue, pour ne pas se retrouver avec des photos mal cadrées, avec des problèmes de focalisation ou de lumière. Quand on est miro, on se fait conseiller d’aller chez l’ophtalmo.
Qui conseille aux home-studistes de faire analyser leurs conditions d’écoute ? Comment savoir si ses écoutes sont « floues », « imprécises »? On s’en rend compte par soi-même quand on entend sa musique diffusée ailleurs, dans la voiture d’un pote, dans le salon des parents. Qui n’a jamais connu la désillusion, celle qui fait dire « oh mon dieu mais c’est de la merde, ça ne sonne pas du tout comme ça chez moi » ? Agrémenté éventuellement d’un petit « tu as un problème avec tes enceintes je crois« . Que nenni. Enfin, si, peut-être, mais globalement non, ce n’est pas exactement ça le bon diagnostic à avoir.

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Un casque fermé et un casque ouvert, ou bleu, ou jaune… (calembour)

Si on écoute le résultat de son travail dans plusieurs systèmes audio chez soi, on se rend bien compte que chaque appareil-qui-diffuse-du-son a sa sonorité, sa couleur. C’est la raison pour laquelle j’ai ressorti cette année ma deuxième vieille paire de Yamaha HS80M, riche en basses, pour avoir un autre angle d’écoute qu’avec mes Mackie HR624 mk2, précises sur tout le reste du spectre. Et je peux écouter aussi mes mixages dans un lecteur CD stéréo basique, un lecteur cassette mono premier prix, un ordinateur portable, mes écouteurs de téléphone Samsung que je connais depuis 2013, et des casques très différents, les Beyerdynamic DT 770 PRO, Audio-technica R80x et Sony MDR-XD100 (oui, c’est un vrai nom de casque, pas un troll) (enfin, pas un troll de ma part en tout cas, peut-être de la part de Sony).

Photo de moi errant à la fac de Segalen (Brest),
également perdu dans ma quête du « bon son »

Au début j’écoutais sur tous ces supports, pour être sûr, car j’étais inquiet. Je voulais multiplier les sources d’écoute, les natures d’appareils de diffusion, pour éviter tout problème qui serait passé inaperçu avec une seule écoute fainéante. Après toutes ces écoutes, quand je suis satisfait, je fais le pari raisonnable que c’est bon, c’est équilibré. Pour être tout à fait honnête, c’était mon protocole il y a quelques années, quand je me sentais très fébrile à l’idée de finaliser de la musique. Depuis, j’ai simplifié mon protocole, car non seulement je sais mieux écouter avec l’acquisition de meilleures méthodes, avec par exemple des écoutes référencées, mais aussi je peux mieux entendre, avec notamment les câbles Asterope, seuls câbles qui ont le droit d’être utilisés chez moi (j’ai l’air de plaisanter, mais ceux qui sont passés chez moi savent comme je ne rigole pas avec les câbles). Entre ces deux évolutions très technicotechniques, vient se glisser un autre progrès, certainement pas le moins important : ma musicalité. La musicalité, c’est ce qui fait comprendre ce qu’est la musique, ce qu’est un style, comment un instrument peut/doit sonner, ce qui est rassurant et ce qui est dangereux. Si on ne sait pas reconnaître un stimulus, à quoi ça sert d’avoir un système d’écoute performant qui délivre des informations qui n’apparaissent pas sur notre radar ? C’est comme avoir un microscope devant ses yeux fermés (je suis tellement doué en métaphores).

Traitement acoustique sommaire : des petits effets
pour beaucoup d’efforts

J’ai l’ambition de rester constamment dans une dynamique de progrès, de découverte, de remise en question, comme tous les passionnés lucides. C’est pénible mais il le faut pour être plus heureux dans des meilleurs choix qui coûtent moins de temps et d’énergie. J’ai révisé des approches, je peux encore les faire évoluer, mais je ne veux pas réviser mon matériel sans l’exploiter complètement, je ne pense pas que ce soit pertinent. Les acousticiens sérieux disent que le lieu d’écoute compte beaucoup plus qu’on veut bien le croire, à tel point que changer les enceintes de monitoring ne sera jamais vraiment la solution la plus satisfaisante, mais juste une fuite perpétuelle du même problème de résonances pourries de son lieu d’écoute. Si on oublie qu’on a un environnement d’écoute qui sert de véhicule au son qui sort de nos enceintes, on ne pense évidemment qu’à acheter du matériel « plus performant ». J’ai assez révisé mon matériel, il est temps de penser à mon environnement d’écoute, que j’ai délaissé pendant… toujours. Bien sûr, on ne peut pas égaler des conditions d’écoute parfaites (ou presque) de lieux qui ont bénéficié de gros traitements acoustiques, mais on peut essayer de compenser un peu les caractères de nos pièces d’écoute hors-de-contrôle. Ce n’est pas parce qu’on ne peut pas avoir la perfection qu’il ne faut pas la viser pour faire de son mieux, vraiment de son mieux.

Amour, chance, argent : Sonarworks est la solution

Il y a eu le Black Friday, je me suis lancé : Sonarworks vendait son kit micro + logiciel Reference 4 à un petit prix. J’aurais très bien pu prendre l’équivalent chez IK Multimedia, le concurrent direct, qui a son propre kit micro + Arc 2. Sonarworks est le leader en la matière depuis plus longtemps. Néanmoins, IK Multimedia semble devenir un challenger de plus en plus sérieux. Si je fais mon fifou, peut-être que je me le procurerai. Pourquoi un micro avec le logiciel ? Le micro livré est optimisé pour que le logiciel puisse savoir précisément les courbes de fréquences à corriger, car c’est ça le principe : une correction est un EQ. Mais pas un EQ « comme on aime bien subjectivement ». Le but est de se rapprocher autant que possible d’une écoute neutre. Et vous savez quoi ? Tous les studios traditionnels ont ce type de corrections. Les enceintes qu’on y voit sont merveilleuses, toutes les machines sont des bijoux, les pièces sont traitées acoustiquement, mais il y a toujours besoin d’une petite correction en plus. Mais ces studios n’utilisent pas ces logiciels « tous publics », on aurait pu s’en douter.

« Moins de devinettes, plus de confiance, moins de temps pour les ultimes finalisations, le même son partout où vous êtes, focalisation sur la musique et pas votre matériel »


On peut lire ici ou là qu’à ces prix « réduits », ces logiciels ne font rien de miraculeux. Ce n’est pas parce qu’on ne peut pas avoir la perfection qu’il ne faut pas la viser pour faire de son mieux, vraiment de son mieux. Je sais, je me répète, mais sur internet il y a beaucoup trop de propos négatifs tenus par des « sachants toxiques ». Alors j’essaye de contrebalancer tous ces pessimismes, frôlant la malveillance, qui peuvent parfois aller jusqu’au mensonge avec des caricatures fatalistes. « Ah, on va tous mourir un jour, à quoi cela sert-il de chercher à faire quoi que ce soit grmmmblblblbl ».

« Sonarworks : le son en noir et blanc » euh « sans couleur » euh « enfin de la musique délavée ».
J’aurais mal compris ?

En tout cas, niveau marketing, Sonarworks fait très fort avec un packaging très « feel good » qui semble nous dire « c’est bon, on est là, tout va bien se passer maintenant ». Quand j’aurai fait des tests concluants, je posterai un nouvel article pour vous en parler.

Des autocollants ! Cool ! Ouais, le micro de mesure aussi…
Mais les autocollants, tout de même !

PS : Rudi, reviens, tu me manques bro.

– Enzo

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1 réflexion au sujet de “La calibration en 2020 : le masque sur la bouche, pas sur les oreilles”

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